STEVE MODESTE : “UNE FOIS QUE TU AS GOÛTÉ À L’ASIE, TU NE PEUX PLUS REVENIR” 

Issu de la famille Modeste, Steve n’a pas suivi la voie la plus attendue. Son cousin Anthony a brillé en Bundesliga, tandis que ses frères ont, eux, évolué en France la majeure partie de leurs carrières… lui a choisi l’inconnu, l’aventure, l’ailleurs. Très tôt, Steve a compris que le football lui servirait à voyager, l’une de ses plus grandes passions, et il allait construire sa vie autour de cette idée.

Steve grandit au Paris FC, où il passe toutes ses classes depuis l’âge de 8 ans. Il se définit d’ailleurs comme “un enfant du Paris FC”. Rapidement, son niveau attire l’attention. Dès ses plus jeunes années, il joue surclassé, affrontant le PSG, Créteil, le Red Star, et participe aux U15 et U17 nationaux. Il finit premier des tests d’entrée à Clairefontaine, mais une décision administrative l’empêche d’y entrer. Il raconte aussi qu’il voyait des joueurs comme Habib Bamogo y être pris, et qu’il pensait avoir largement le niveau pour y être avec eux. “L’année d’avant, il y avait eu des problèmes de discipline. Du coup, ils ont décidé de ne pas prendre de 82 [ndlr : génération 1982]. Moi j’avais Monaco et Lens qui voulaient me recruter, mais le club a refusé.”

l “J’ai mis presque un an à revenir”

Puis survient la blessure. Lors de son premier match U15 National, il subit une double fracture tibia-péroné. “J’ai mis presque un an à revenir. Mais même après, je voyais que le Paris FC jouait en dessous des Nationaux, le pro s’éloignait.”

Alors, quand une opportunité en Finlande se présente à 19 ans, il la saisit. “C’était un ami à moi, formé à Clairefontaine, qui jouait là-bas. J’ai signé au PV Kokkola. Je touchais des primes de match, 300-400 euros par match.” Là-bas, il découvre un football très direct, des conditions rudes, et une culture totalement différente. Il se souvient que l’Allemagne et la Suède suivaient beaucoup ce championnat et que ce challenge pouvait lui permettre de rebondir dans un club de plus haut niveau. "Ça m’a aidé à me projeter de nouveau dans une carrière pro." Le choc est rude : climat, nourriture, isolement… mais Steve découvre un nouveau monde et un mode de vie où il fallait s’adapter vite, s’entraîner dur, et accepter la solitude. “On perd les play-offs sur le dernier match. Je suis rentré en France, mais je savais que je voulais repartir.”

l “J’ai compris que je voulais voyager, que le foot serait mon moyen de le faire”

De retour au Paris FC, tout a changé. Les places sont chères et la sienne a été prise. Alors il accepte un contrat à la Réunion. “Je connaissais rien, mais là-bas j’ai eu un déclic. Ma mère est guadeloupéenne donc je me retrouvais un peu dans cette mixité. J’ai compris pourquoi l’île s’appelle la Réunion, parce qu’il y avait de tout, toutes les couleurs, toutes les religions. J’ai découvert la richesse humaine de la Réunion. Le niveau de foot aussi m’a surpris, c’était technique et physique, les meilleures équipes pouvaient jouer en National en France. J’ai compris que je voulais voyager, que le foot serait mon moyen de le faire.”

l “Je voulais finir ma carrière au Japon, pour moi c’était le rêve ultime.”

Puis arrive l’Australie. Un contact le met en relation avec un coach français à Sydney United. “Je savais même pas vraiment où c’était. Mais j’y suis allé. Là-bas c’était très physique, beaucoup de Serbes, de Croates. Un football rude, mais ça m’a forgé.” Il raconte que le sport principal est le rugby, et que cela se ressent dans l’approche très physique du foot local. C’est là qu’il forge son projet : il commence à s’intéresser aux championnats asiatiques, regarde des matchs et des vidéos en ligne, se déconnecte peu à peu du football européen et se fixe un objectif devenu une idée fixe, un leitmotiv : aller jouer au Japon. “Je voulais finir ma carrière au Japon, pour moi c’était le rêve ultime.” Il trouve un agent travaillant avec ce pays, son rêve s’affine.

Pour y arriver, il passe par la Thaïlande où il signe au Royal Thai Army FC, puis au Vietnam avec le Sài Gòn FC, et enfin en Indonésie avec Arema FC. C’est un grand voyage, un enchaînement de pays, d’expériences, de stades, de cultures.

Il raconte aussi combien les Asiatiques sont parfois timides mais qu’il suffit parfois de montrer son envie de s’intégrer pour qu’ils ouvrent leurs portes et leurs coeurs. Steve se rappelle : “Je mangeais chez la grand-mère d’un coéquipier, on allait chercher sa petite soeur à l’école, puis on allait jouer à la PlayStation dans les salles d’arcade du quartier.”

Dans le jeu, tout était différent partout, comme en Europe avec ses nuances. Il évoque ses coéquipiers : des grands brésiliens devant et derrière, des ghanéens ou camerounais très rapides sur les ailes. Partout, Steve apprend la même leçon : rien n’est acquis. “Ils s’en foutent que tu aies été formé en France. Tu montes sur le terrain, tu dois prouver.”

l “En France, en N2 ou N1, les tribunes sont vides”

Pour lui, l’Asie offre ce que la France n’a plus : la ferveur. “Même dans des divisions moindres, le stade est plein, c’est la fête. Pour eux le foot c’est un événement, tout le monde se réunit.” Chaque match devient un moment de partage et de joie, et c’est avant tout ça qui lui a plu. “Il y a aussi toute la ferveur autour du joueur de foot, on te regarde comme un demi-dieu. Les gens te reconnaissent dans la rue, ils viennent t’encourager à l’entraînement, chose que je n’aurais jamais pu espérer en France. En France, en N2 ou N1, les tribunes sont vides.”

Aujourd’hui, son grand périple asiatique est derrière lui mais Steve transmet tout ce vécu à la jeune génération. Désormais éducateur en pré-formation au MHSC, il accompagne les jeunes avec cette vision unique, forgée aux quatre coins du monde. Il insiste souvent : “Il faut y aller. N’hésitez pas, partez. Si le chemin est bloqué chez vous, allez tenter votre chance ailleurs. Moi je regardais des vidéos des championnats asiatiques, du Japon, du Vietnam, et j’ai fini par passer le pas. Et puis niveau salaire c’est mieux que la Nationale...” Il explique aussi : “Le plus dur c’est le premier voyage. Mais généralement, après un premier voyage, tu rentres en France et tu te dis non, il faut que j’y retourne. Et une fois que tu as goûté à l’Asie, tu ne veux plus revenir en Europe. C’est fini, tu restes en Asie, c’est sûr et certain.” Il conseille aux jeunes de se renseigner et de saisir la moindre opportunité. “Je veux leur montrer qu’il n’y a pas qu’un seul chemin. Moi, j’ai voyagé grâce au football. Et je n’ai aucun regret.”

👉 Tu es joueur et tu veux tenter l’aventure asiatique ?

Participe à la prochaine détection Vision FC

Un programme inédit, pensé pour te permettre de jouer en Asie, dans les meilleures conditions.

🔗 Suivre les aventures de Steve

Suivant
Suivant

JEFFREY BALTUS : “LÀ-BAS, MOI LE PETIT JOUEUR DE FRANCE, JE SUIS UNE ICÔNE”